Anse de Rotheneuf - Bretagne.A cinq kilomètres de Saint-Malo Intra Muros, en longeant la mer en direction de cancale, les Rochers Sculptés de Rothéneuf constituent un univers étrange, peuplé de personnages d’un autre temps.
Des figures grimaçantes façonnées par la main de l’homme évoquent les gargouilles médiévales et les êtres fantasmagoriques de nos cathédrales.
Cette œuvre est due à l’abbé Adolphe Fouré (1839-1910), ordonné prêtre à Rennes. A 55 ans, une attaque cérébrale le laisse sourd et muet. L’abbé se retire à Rothéneuf et y sculptera, à même le rocher, plus de 300 personnages.
L'abbé Fouré avec les représentations de Monsieur et Madame Rothéneuf S’inspirant de la légende des Rothéneuf, lignée effrayante de corsaires, pirates et nobles au tempérament sanguinaire, il met en scène chaque membre de cette famille, flirtant avec les créatures de l’enfer.
Le résultat est un jardin de pierre d’une superficie de 500 mètres carrés, dominant l’océan dans un site extraordinaire.
L'histoire :
Venant de la plage des Chevrets, en Saint-Coulomb, et après avoir fait le tour de l'Ile Besnard (qui est devenue une presqu'île), vous aboutirez au Havre de Rotheneuf.
En face, sur la pointe, vous apercevrez Notre-Dame des Flots,
calvaire érigé par les marins.
Il faudra faire le tour de cette grande anse ... ou attendre une belle marée pour traverser le goulet qui sépare l'île du village.
Celui-ci a trouvé sa célébrité dans une des nombreuses histoires de pirates et contrebandiers qui ont fait les légendes des Côtes d'Armorique ...
Mais ici, point de légende mais une histoire vraie, immortalisée par un ermite. Muré dans le silence d'une maladie qui le fit se retirer sur ce rocher, l'Abbé Fouré en martela les aspérités, jour après jour, pendant 25 années !
S'inspirant de l'histoire de la famille Rothéneuf composée de corsaires mais aussi pêcheurs, pirates et contrebandiers qui ont dominé la côte à partir du milieu du XVIe siècle, il entreprit un travail colossal dont un bonne partie reste encore gravée dans le roc.
S'étalant sur près de 500 mètres carrés de rochers sur la falaise, la saga des Rotheneuf se lit comme dans un livre ...
Autrefois, cet endroit abritait une chapelle du 17ème siècle dédiée à Saint-Budoc. Elle a aujourd'hui disparu.
Les Rotheneuf étaient des marins émérites et d'intrépides guerriers qui étaient arrivés, grâce à la terreur qu'ils faisaient régner, à se faire respecter par les Malouins eux-mêmes !
Ils construisaient des vaisseaux rapides et robustes appelés "flèches des flots" avec lesquels ils écumaient les mers afin de s'enrichir au détriment de leurs malheureuses victimes. Ils étaient sans doute corsaires mais aussi pirates !
Apres au gain et parfois irascibles, leurs rapports de voisinage se voulaient toutefois francs et chevaleresques afin d'éviter les heurts avec les seigneurs locaux.
Face à la Pointe, les petites îles, rochers et cailloux qui émergent au gré des marées ont hérité du surnom de plusieurs membres de la tribu : l'Ours, le Haut Queue, la Bigne, le Grand Pointu, Trois Pierres, le Grand et le Petit Chevreuil et d'autres encore sont évocateurs des caractères de ceux-ci ...
Mais les composantes de cette superbe fresque ne se limitent pas à l'histoire des Rotheneuf. Elle se veut une allégorie des moeurs de l'époque qu'elle raconte. Il faut scruter les rochers, pierre par pierre, pour en découvrir les différentes facettes ...
En parcourant le site, on y découvre en effet des éléments qui ne paraissent ne pas y avoir leur place ... tel que l'Egyptien, représentant en réalité un des personnages ayant gravité autour de la tribu.
Ces sculptures paraissent parfois monumentales grâce à une mise en valeur des perspectives et le visiteur est surpris lorsqu'il les découvre : elle reviennent alors à une taille humaine ...
Là, un reptile marin semble gravir la falaise, se faufilant dans les méandres d'une représentation presque irréelle ... Plus loin un monstre à tête de salamandre bondissant sur sa proie, ailleurs encore un démon paraissant sortir de l'enfer à la recherche d'une victime.
Les représentations de Saints, tels Urbain, Budoc ou Sylvain et une reproduction de la chapelle Saint-Budoc complètent le tableau.
En tout une galerie de portraits dont certains, plus hideux que les autres, tendent à représenter le caractère des différents membres d'une famille dont le destin sera de disparaître dans la même violence que celle qu'elle aura engendrée ...
Exposée en plein vent, la puissance des tempêtes et l'érosion des embruns abîment irrémédiablement cette fresque gargantuesque dont certains détails ont déjà disparu.
Décédé en 1910 à l'âge de 71 ans, l'abbé Fouré a laissé derrière lui une oeuvre unique au monde !
Plus loin, dans les terres, se trouve la maison de campagne de Jacques Cartier : le manoir de Limoelou.